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Sinistre Disco Ball... 60  ans de dystopie psychologique
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C'est quoi ce truc ?
En un tout premier temps, Sinistre DiscoBall n'était qu'un pari idiot sur lequel je pensais me casser la figure avant d'avoir écrit le douzième du premier jet. En un second temps, il a été envisagé, sans trop y croire, de le publier en auto-édition numérique. En un troisième, envisagé de même mais sérieusement et assez follement. En un quatrième... nous y voici. Publication sur blog.Tout  simplement. 

Description du projet : ICI.
Complément à description : LA.

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7 septembre 2020

1.22 > Alex, il est sympa, mais il déteste gros

Sanglier de Feu

2067

Roch

Finalement, les calculs d'Alex étaient justes. Le logiciel installé sur leurs moto les a rendus plus efficaces que tous les autres convoyeurs, et les lieutenants du Marionnettiste ont fait appel à eux plusieurs fois. Ça les a renfloués juste à temps. S'il y a une chose que Roch déteste, c'est dormir ventre vide. Et pis, en hiver il vaut mieux trouver un squat pas trop miteux.

Les barbecues que le copain sait faire avec des rats, il n'est pas non plus tellement amateur. Faut croire qu'il n'a pas grandi dans le bon quartier. Qu'il s'est enfui trop tard de chez lui. Rien à faire. Il ne peut accepter ça que quand il n'a plus rien avalé depuis deux jours. Pas pire que les boites de bouffe synthétique, à ce qu'on dit. Mouais. Sauf que c'est des rats.

Presque tous les soirs, il en voit se balader dans la chambre. Les boites, jusqu'à présent, c'est jamais arrivé. C'est marrant, ces petites choses. Presque mignon. Ça vit dans la saleté, mais eux aussi, alors il va pas leur en jeter la pierre. Peut-être qu'il est un rat et qu'il ne le sait pas ? Et peut-être qu'il commence à débloquer sévère de la tête. Y'en a plein dans le Losange, qui deviennent fous. Une façon comme une autre de supporter la mocheté tout autour. Y'en a qui sont adaptés au milieu. D'autres pas.

Le chef de leur squat, c'est une fille, qui se balade avec un rat apprivoisé sur l'épaule. Il a même une boucle d'oreille, ce bestiau, et certains jours elle lui met un ruban au cou. Enfin... une fille... faut le dire vite. Le mètre quatre-vingt passé, plutôt costaude, tatouée de partout. Une des très très très nombreuses copines d'Alex. Sauf qu'elle est tombée amoureuse qu'un petit gringalet qui peint des trucs partout sur les murs et raconte des trucs compliqués. Même qu'y veulent un gosse, ces deux fous. En tous cas, elle ne leur a pas demandé de payer pour s'installer et surveille qu'on leur fout la paix. Faudra quand même déménager bientôt. Par sécurité, dit le copain. De toute façon, Alex personne n'ose lui demander de payer pour s'installer. Trop impressionnant. Y'a juste pour avoir un lit qu'il doit dépenser, et encore. Le comparse à belle gueule mais sans muscles ni réputation en profite avec lui.

Z'ont des sous. Assez pour devoir se méfier qu'on ne vienne pas les leur voler quand ils dorment. Assez pour que les mendiants leur tournent autour et que des tas de gagne-petits essayent de voir s'ils ont besoin d'aide pour ceci ou cela. Assez pour entretenir les motos et bouffer. C'est l'essentiel.

Roch apprécierait un logement un cran au-dessus. Cette piaule sale et surpeuplée, avec des matelas déchirés posés directement par terre, ne lui convient pas. Alex a préféré privilégier d'autres dépenses. Lui, il n'a pas insisté. Avec ce qu'ils ont partagé, il s'est acheté des fringues. C'est inutile, c'est con, mais il a vingt ans, il est beau, faut qu'il en profite. Et puis, chacun ses dépenses perso.

Alex aussi aimerait sûrement une vraie piaule. Il n'a pas peur des squats bourrés de puces, mais préfère les ruelles quand il fait beau et les chambres au-dessus des bars quand il a de quoi payer. Le luxe dont il raffole, le copain, c'est une douche. Chaque fois qu'il en a une, il s'y jette avec autant de hâte qu'un ivrogne sur une bouteille. Il ne se baigne jamais dans le lac, trop pollué, mais profite souvent des pluies et même de la neige. Roch ne serait pas non plus fâché de se laver un peu. Alex a raison. Il est crado. Tant qu'il aura cette dégaine, aucune nana ne voudra de lui. Et lui, il n'a pas le courage de se frictionner avec de la neige pour ôter la crasse. Z'ont des sous... mais pas assez pour un logement avec eau courante, même une seule nuit.

Le mois dernier, le copain s'est encore rendu chez ce médecin, et hier dans une pharmacie. C'est ses affaire, bien sûr, mais ils sont associés, alors lui aussi ça le concerne. Du coup, il l'a suivi discrètement. Par contre, il ne lui a posé aucune question. Il a seulement fouillé dans son sac, où il n'a trouvé que des épines médicales enfermées dans un flacon rendu anonyme par une étiquette soigneusement déchirée. Le copain est méfiant comme un vieux loup et ne dira pas de quoi il est malade. Vu que ça dure depuis plusieurs années, ça ne doit pas mortel, mais comme c'est soigné avec des épines à injection ça doit quand même être sérieux.

C'est pas comme des habits. C'est une dépense importante. Mais du moment qu'il n'en parle pas, la seule chose que Roch est supposé savoir, c'est qu'ils ont partagé des sous. Alors il peut faire ce qu'il veut avec les siens.

Il neige depuis le matin. L'écran holographique mural qui se trouve en face de leur « chez eux » est dans un état plus que douteux, et supporte le froid avec des distorsions effrayantes. La fabuleuse Léda, toute virtuelle qu'elle soit, ne parvient pas à maintenir son apparence entière. Son invité bien réel encore moins. Leurs voix, pourtant, résistent vaillamment, et les fantômes agglutinés autour des braseros écoutent machinalement. Pour s'occuper la tête. Pour ne pas geler dedans. Ou bien n'écoutent pas. Le Losange est rempli de zombies qui n'ont même pas du vent dans la cervelle.

C'est pratique, cet écran, pour avoir les infos. Tout de même pas une raison pour rester assis devant toute la journée. Ou debout. Sans bouger, on ne sort pas de la crasse, on s'y enlise. Tous ces cons ont plus avalé de kerag que de bouffe, ça saute aux yeux.

A demi-tourné, faisant semblant d'examiner une fêlure sur son casque de moto, le jeune homme regarde le tatoué glisser une petite boite plate dans la poche intérieure de son blouson. Il y range quelques comprimés de kerag, mais peut-être qu'elle contient aussi des épines médicales. Comment savoir ? Il faudrait qu'il arrive à fouiller pendant qu'il dort. C'est pas ses affaire, bien sûr... mais si Alex crève, il crève aussi. Ou presque.

Aujourd'hui, ils ont rendez-vous avec un gars du Marionnettiste. Un paquet, bien sûr. Voyage à effectuer loin et rapidement malgré l'hiver qui fait déconner les voies magnétiques. Ça va bientôt devenir de la routine. Leur plus gros souci de fric, en fait, c'est qu'il va falloir changer leurs habitudes s'ils ne veulent pas se le faire chouraver. Faire les minables pour qu'on pense qu'ils n'en ont pas. Ou bien se dénicher une vraie chambre à louer, avec serrure à la porte, ou un squat rien qu'à eux. Comme dit Alex, ils ont fait un super level-up. Lilas dit que leur équipe est classée parmi les cinquante meilleurs du continent et qu'ils ont vraiment fait une percée en flèche.

Patiemment, le jeune homme laisse Alex examiner le bleu qu'il arbore à la figure. Résultat d'une bagarre où il n'était pas le plus fort, et d'un mur qu'il n'a pas été assez bon pilote de moto pour éviter. Les grosses mains effleurent, détaillent, appuient un peu, avec un calme inquiet et une douceur rassurante. Y'a des jours où le géant lui rappelle sa mère, et Roch déteste ça.

– C'est pas beau à voir. Avant le voyage, faudra qu'on aille montrer ça à un guérisseur, des fois qu'il y ait un truc en-dessous. J'en connais deux-trois qui me doivent des bricoles, alors ça te coûtera rien. Pour le moment, comme on ne voit pas trop que ton casque est cassé, l'idéal serait que tu le gardes sur la tête.

Roch ne dit rien. C'est sa faute, et c'est vexant. Il a défié un connard, qui a appelé les copains, et ça s'est fini en course-poursuite entre les immeubles. Le logiciel de navigation n'est pas calculé pour gérer des situations pareilles. Pas encore. Lilas en a promis un à cet effet, pour échapper aux motards de la police et à tous pillards qui pourraient s'en prendre à la marchandise. Pour le moment, il est juste prévu pour optimiser le voyage moyenne et longue distance.

Il a fait le con. Comme trop souvent. Alex ne le lui dit pas, mais il le pense. Il s'est conduit comme un môme sans cervelle. Tant pis. Ce qui est fait est fait. Faut bosser.

– Heureusement qu'il est là, le Marionnettiste... sans lui...

La tronche d'Alex vire à la gueule de monstre.

– Répète ça et je t'écrase !

– Mais... sans lui...

– Le Marionnettiste, si un jour j'en ai l'occasion, je lui arrache les tripes ! Je bosse pour lui parce que j'ai pas envie de crever de faim, et seulement pour ça. J'irais même plus loin que ça ! Tuer, j'en fais jamais un plaisir. Ce quartier, c'est une jungle. Je suis jamais le premier à sortir mon arme mais j'hésite pas. Question de survie. Hé ben, si j'avais l'occasion, j'aime autant te dire que je lui ferais vider tout son sang avec plaisir, à ce salopard !

Le faciès du tatoué est déformé de rage. Roch en reste pétrifié. En six ans il ne l'avait jamais vu dans cet état. Il ne s'était jamais rendu compte, non plus, qu'il haïssait le caïd à ce point.

Personne n'aime le Marionnettiste. Personne ne peut se permettre de le détester. Il est trop puissant. Il sait trop de choses. Il agit sur trop de domaines. Le détester est un luxe pour gens riches qui ont les moyens d'être honnêtes et scrupuleux. Ici, on est sur son territoire. Tout lui appartient, y compris les gens, jusqu'à la moindre bribe de leurs consciences.

Sauf Alex, dirait-on...

Le baraqué s'enfonce brutalement le casque sur la tête.

– Dépêche-toi. On va être en retard.

Quelque part, le jeune homme est admiratif, de cette mentalité qui frôle le suicidaire. Des fois, il se dit que derrière ses airs de dur qui dresse toujours la tête, Alex est un punching-ball. Qu'en fait il accepte pratiquement tout sans broncher. Ne se donne la peine du combat que si le danger est physiquement évident...

Quand il choisit un ennemi, il vise pas petit, le copain.

Le Marionnettiste... rien que ça...

– T'es... sérieux ? Tu penses vraiment le tuer ?

– Raconte pas de bêtises. J'en aurai jamais l'occasion. Et puis, j'aurais pas dû te dire ça. Tu causes trop facilement. Ramène-toi. Un bon convoyeur ne doit pas être en retard.

– Pfff... c'est chiant, ce job. Pour changer, tu peux pas nous trouver un type à descendre ? En plus, c'est mieux payé, et même pas plus risqué.

– Tueur, c'est pas un boulot que j'aime, et vu comment on est cotés comme convoyeurs on gagnera bientôt autant. Quant aux risques... ça dépend comment on voit les choses. Si on se fait prendre, le risque est pas le même non plus.

Ces derniers temps, Alex n'a pas eu ces crises de sexe qui lui bouffent la cervelle. C'est presque agaçant, cette caboche qui carbure toujours impecc. Roch grogne un coup et enfile le casque abîmé.

vase-gaulois

 

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Commentaires

RAT BUFFLE TIGRE

LIEVRE DRAGONSERPENT

CHEVAL CHEVRE SINGE

PHOENIX CHIEN SANGLIER

 

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