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Sinistre Disco Ball... 60  ans de dystopie psychologique
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C'est quoi ce truc ?
En un tout premier temps, Sinistre DiscoBall n'était qu'un pari idiot sur lequel je pensais me casser la figure avant d'avoir écrit le douzième du premier jet. En un second temps, il a été envisagé, sans trop y croire, de le publier en auto-édition numérique. En un troisième, envisagé de même mais sérieusement et assez follement. En un quatrième... nous y voici. Publication sur blog.Tout  simplement. 

Description du projet : ICI.
Complément à description : LA.

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26 juillet 2021

2.15 > Le jeu du policier et du gangster.

  Tigre de Métal

2 novembre 2070

 Alex-Pique.

Roch a été bon élève. Trop bon élève. L’arrestation d’Alex a été réglée en moins de trois jours. Il n’a pas eu le temps de revoir la rouquine. Il sait juste qu’elle s’est fait enguirlander pour lui avoir cogné dessus. Et pas qu’un peu. Malgré la terreur qu’ils inspirent, surtout dans les quartiers mal famés, les SU sont triés sur le volet et surveillés de près. Trois jours… pas eu le temps de revoir Sarah, et même pas celui de profiter des soins du connard de docteur. En le retrouvant amoché, Roch a piqué une rage monstrueuse et promis de le venger.

Il ne fera rien. Pas de bêtise, en tous cas. C’est un colérique, mais pas un imbécile.

Il commence même à savoir réfléchir. Malgré ce qu’il lui a gueulé dessus juste avant d’être arrêté, Alex s’en rend bien compte. Avant, il pratiquait l’entourloupe selon ce qui lui avait été expliqué, ou bien simplement pour le plaisir. Ça lui a fait du bien d’être seul chef cet été.

Comme il l’avait annoncé, et malgré la réactivité prometteuse de Roch, Alex ne pose plus un pied à la Baleine Bleue. Un autre bar, nommé le Tonneau Endiablé lui a fait de l’œil, un soir où il contrôlait les vendeurs du quartier. étrangement stylé. Délicieux d’une fausse ancienneté que Baudouin Matyald avait mise à la mode, il y a une quinzaine d’années, mais qui est redevenue ringarde presque tout de suite. Entreprise familiale, où bossent quatre générations, depuis la vieille grand-mère racornie qui gère les comptes et dit la bonne aventure jusqu’à une tribu de jeunots armés d’un couteau sur la cuisse droite et d’une petite sacoche sur la gauche, pour y ranger un livre. Mémé tient à ce qu’ils étudient. Comment Pique, si attentif à tout, avait-il pu ne jamais repérer cet endroit ? Il y prend ses repas et y reçoit les visites en tous genres. Celles liées aux affaires et celles liées à sa vie privée. Cela fait pas mal de monde, même si les deux se mélangent souvent.

— Bonjour. Je peux m’asseoir ?

Il hallucine ? On lui a mis du kerag dans son jus qualité vitaminée ? La rouquine est accoudée au siège. Pas d’uniforme, mais un blouson beige au col encore étincelant de l’humidité qui flotte dans l’air et un pantalon gris. Elle n’est pas très souriante, mais il ne va pas faire le difficile.

— Si tu veux. Je t’offre un verre, Sarah ? Je peux t’appeler par ton prénom ?

— Non, tu ne peux pas. J’ai été virée de l’unité à cause de toi. Et mon maintien dans les forces de l’ordre est encore conditionnel. Alors je veux des explications. Et je veux que tu reviennes te constituer prisonnier. Je ne sais pas comment tu t’es évadé, et je m’en fous. Tu as été arrêté.

Elle s’est assise en face de lui et le fusille consciencieusement de ses beaux yeux de jeune fille honnête qui croit en la Loi et en la Justice.

— On se calme, Sarah. Toi gentille. Moi, méchant. Toi flic. Moi bandit. Toi joli ange. Moi vilain salaud. Je sais pas ce qu’on t’a dit, mais je suis sorti de façon régulière, j’ai pas fait un trou dans le mur. Toi arrêter moi. Moi évader de prison. C’est la règle du jeu.

— Ce n’est pas un jeu, et tes copains hackers, on les coincera aussi.

— Tout est un jeu, Sarah… A quoi servirait d’exister, sinon ?

Totalement interloquée, elle ouvre des yeux immenses. Il rit, pas très fort, à cause de ses côtes qui lui font mal, interpelle le barman en lui demandant deux cafés. Un peu gêné, il fouille les prunelles noisette où brille un éclat froid, entre brutalité et inquiétude. Un peu fou, il se lisse la barbe en caressant sans vergogne les jambes de la fliquette avec son pied. Elle se rabat au plus près de la banquette. Il la suit. C’est pratique, d’être grand. Lui emprisonne une cheville entre les siennes. Puis l’autre. Puis encore le premier. Elle essaye de lui échapper. Il la poursuit, la rattrape avec un sourire de mioche farceur, la capture, lui malmène les mollets avec les gros clous qui ornent ses bottes de méchant garçon fringué comme ceux d’il y a un siècle, lui racle les guibolles, la relâche, cherche déjà l’autre pied, qu’il happe sans difficulté. Elle s’agrippe au siège en fermant les yeux et le laisse emmener la jambe captive de son côté à lui.

Les consommations arrivent à point pour qu’elle trouve quelque chose à dire sans avoir besoin de se fâcher. Alex soulève sa tasse, mais ne lâche pas sa proie. Il s’amuse comme un petit fou, mais elle n’est sûrement pas venue le voir pour des rapprochements sous la table entre policier et gangster.

— Tout est un jeu, je t’assure… Il n’y a rien de vrai nulle part. Juste des lumières trompeuses.

— Ce que tu as dit dans le camion…

— Ah ? Ça te trouble, hein ?

Elle avait déjà beaucoup rougi. Elle le fait encore plus.

Il la laisse ramener sa jambe près d’elle. Retire ses lunettes noires. La fixe droit en face. Lui fait contempler le charbon enflammé de ses yeux. L’incendie carrément avec. Sous le blouson, elle porte un t-shirt camouflage, dans les tons verts. Ça va maxi-giga bien avec ses cheveux.

— Sans ça, tu ne serais pas ici, jolie braise ! Ta présence est déjà une réponse, parce que venir te mettre à ma merci, il faut qu’en effet mes « je t’aime » t’aient rudement tourneboulé la tête. Si je te saute dessus, cette fois t’as pas ton armure. Tes collègues sont à deux pas, je suppose ?

La voilà devenue tomate. Cette fois, elle ne peut plus rougir plus que ça.

— Je suis armée, et puis on dans un endroit public. Ce que tu as dit… C’était vrai ?

Toute hésitante, elle est mignonne comme un cœur. Alex se régale la tête de l’idée que cette petite chose timide est la même fille dont il a admiré la façon de tenir fermement un pistolaser.

— Hé ben oui, rouquine de mon cœur… aussi emballée que tu sois dans ton uniforme, je te reconnais à 500 mètres. Quand tu fouilles le secteur, j’ai envie de courir vers toi au lieu de me carapater. Quand tu parles dans ton micro, c’est la plus belle des musiques. C’est con, hein ?

— Je ne suis même pas belle. Et puis, tu es… enfin… tu es un trafiquant, quoi ! A quoi ça rimerait ?

— Camé, cinglé, et criminel. J’ai tous les défauts. J’suis même plusieurs fois assassin, figure-toi ! Oui, oui… à mon premier cadavre, j’avais à peine douze ans, pas de tatouage et trois fois rien de chair sur les os, mais mon coup de couteau était déjà pas mauvais.

— Heu… je suppose, en effet. Douze ans… c’est…

Dans le Losange, à douze ans, on est pas adulte parce qu’on n’en a pas encore la carcasse, mais on n’est plus un gosse depuis belle lurette. Elle n’a pas osé poursuivre la phrase. Il la devine angoissée. Peut-être honteuse d’avoir grandi dans un monde moins préhistorique que celui-là.

—  Et comme tu l’as peut-être remarqué, j’ai un grain dans la caboche. Mais tu n’es pas très bien, toi non plus, trésor d’enfer. Venir ici juste pour écouter mes délires, faudrait être encore plus malade que moi. T’as une idée en tête, mon amour. Joue cartes sur table. T’es en mission, je le vois bien. Tes chefs veulent que je joue les balances ? T’as une dizaine de collègues tout près d’ici ? T’as un micro dans le blouson ?

— Paraît que t’es malin… fais le bon choix. Il n’est pas trop tard pour arrêter ce que tu as lancé.

— Tu veux rire ? Est-ce qu’un sculpteur démolit sa statue avant qu’elle soit achevée ?

— Il ne s’agit pas d’une œuvre d’art, mais d’un immonde réseau de distribution de drogue !

Elle s’est presque levée, tellement cette idée la choque. Il sourit de la voir s’animer ainsi. S’ils n’étaient pas de part et d’autre de la table, il la ferait asseoir sur ses genoux.

— Pour toi, c’est un truc immonde. Pour mon associé, un moyen efficace de se faire du fric. Pour moi… comment expliquer ? Tu fais des jeux vidéo, des fois ? Hé ben, je quitterai la partie que si je perds tous mes points. Le fric… du moment que j’ai mon couteau pour crever les rats et du feu pour les faire cuire, je peux m’en passer.

— Tu es fou… absolument fou…

— Ça se peut bien, rouquine de mon cœur… mais je ne détruirai pas mon œuvre pour te faire plaisir. Même si je rêve de toi toutes les nuits.

— Si ce qui t’excite, c’est la stratégie commerciale, tu peux faire ça avec des produits autorisés…

Déboussolée à fond, elle a l’air. Total désemparée. Il a envie de serrer doucement, comme sa grande sœur faisait quand il se blessait. Maudite table. Il lui prend la main et lui câline les doigts.

— J’ai commencé dans les pièces détachées pour moto… chouravées sur commande du client, il est vrai. Puis j’ai fait transporteur pour d’autres gars. Pis vous nous avez gentiment dégagé le marché du kerag.

— Et tu le récupères. Oui… logique.

— J’en fais encore, des pièces détachées. Ça permet de camoufler les trucs plus dangereux. Mais mon pote a raison… La mécanique commerciale c’est pas que de l’habileté à tout dénicher. Faut que ça soit rentable. Note que j’ai pas des goûts de luxe. Même avec des pièces pour moto, j’arriverais à survivre.

Elle ne dit rien. Elle pique du nez sur son verre vide. L’air tout triste. Il en a un brasero dans la poitrine. Ce petit tremblement dans ses yeux, c’est le plus beau cadeau qu’on lui ait jamais fait.

— Toi gentille, moi méchant. Oublie pas.

Il se remet à lui taquiner les pieds. Elle laisse échapper un micro-sourire.

— Tu es plus gentil que beaucoup de gens honnêtes que je connais.

Elle regarde la table. Presque penaude. Il contemple sa mine défaite.

— Ton bras cassé… comment il va ?

— Gentil ? Moi ? Tu veux pas que je devienne quelqu’un de bien, tant qu t’y es ? Désolé, Sarah… pas pour moi ! J’aurais même pas le temps de crever de misère que je serais déjà mort d’ennui. Pis, désolé aussi pour ce que j’ai fait y’a six mois. J’suis pire que marteau, mais je t’aime.

Elle affiche une petite moue entre douceur et tristesse. Il prend une des mains posées sur la table. Sa peau est aussi douce et fragile que ses gants d’armure sont secs et durs. Lui caresse encore les doigts, en maudissant son bras en écharpe qui l’empêche de saisir les cinq autres.

— Mon bras ? Y me fait moins mal que mes côtes. Ça se recolle, je suppose.

Envie de commander deux autres verres. Sauf que les collègues de Sarah pourraient se manifester.

Et pis, une des serveuses sort avec un bon copain de Roch, et il passe la chercher tous les soirs.

 

2020-03--tasse-et-bougie

 

 

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RAT BUFFLE TIGRE

LIEVRE DRAGONSERPENT

CHEVAL CHEVRE SINGE

PHOENIX CHIEN SANGLIER

 

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